Le sénateur Franck Montaugé est intervenu, en tant que rapporteur de la commission des affaires économiques, dans la discussion générale sur la proposition de résolution européenne en faveur de la préservation d’une politique agricole commune forte conjuguée au maintien de ses moyens budgétaires (lire ici). L’objectif de cette démarche est d’infléchir le projet de la future PAC (lire ici) qui prévoit des baisses drastiques du niveau des aides directes.
« Après l’annonce des -5% de la commission et puis, comme un coup de canon, la correction opérée par le commissaire au budget qui nous amène à -14% sur les aides directes et -27% sur le développement rural, on peut former les plus vives inquiétudes sur l’aboutissement du processus », déclare Franck Montaugé qui a mis l’accent sur un certain nombre de propositions contenues dans la proposition de résolution présentée à l’examen du Sénat. « Ces propositions illustrent la responsabilité et la solidarité dont nous devons faire preuve à l’égard des acteurs du monde agricole et des producteurs en premier lieu» dit-il.
« Le système du pur libre marché,qui place directement et en permanence le producteur seul en confrontation de marchés volatils ou d’acheteurs concentrés, est incompatible avec une économie agricole variée, performante et durable. Les crises nombreuses doivent pouvoir faire l’objet d’interventions, avec de nouveaux outils – je pense aux mécanismes contra-cycliques ou d’aides volontaire à la gestion des volumes du marché, comme le volume complémentaire individuel (VCI) pour le vin par exemple. Nous en appelons aussi à l’activation en temps opportun de la réserve européenne de crise et à sa gestion par période triennale. Les outils assurantiels et les fonds de mutualisation de gestion des risques doivent être promus et accompagnés. »
Le contre-exemple des zones défavorisées
« Sur le plan des principes de gestion de la PAC, nous en appelons au pragmatisme pour être efficace dans la concurrence et dans la gestion des crises nombreuses, ajoute le sénateur du Gers. A cet égard, dit-il, la façon dont la France et l’Europe gèrent la révision de la carte des zones défavorisées simple est un contre-exemple absolu en matière de pragmatisme.
« Dans mon département, par le truchement de critères ubuesques, 140 éleveurs situés sur des territoires de fortes pentes, aux potentiels agronomiques parmi les plus bas de France vont devoir arrêter leurs exploitations par perte des ICHN qui font une part essentielle du faible revenu qui leur reste. 1 million d’euros de perdu sur 6 au total dans le Gers, terre ancestrale de polyculture élevage. »
« Stop au darwinisme agricole et au sacrifice délibéré des paysans les plus modestes! Après des cas comme celui-là, injustifiable, inexplicable aux hommes et aux femmes qui en sont les victimes, il ne faut pas s’étonner que l’idée européenne régresse et que le populisme de rejet des grandes constructions de l’après-guerre gagne du terrain au péril de la démocratie… c’est aussi cela la question de la PAC! »
« Malgré tout et c’est le sens et l’esprit qui a présidé aux travaux du groupe de suivi et à cette proposition de résolution européenne, il n’est pas trop tard et nous faisons des propositions qui vont dans le sens d’une meilleure insertion et prise en compte des agricultures dans les diverses transitions auxquelles notre société et nos territoires doivent contribuer. »
« La PAC, dans le cadre de la politique énergétique nationale et de la PPE à venir (programmation pluriannuelle de l’énergie), doit faciliter les investissements des agriculteurs en matière de production d’énergie renouvelable. Les cultures, les forêts stockent on le sait d’énormes quantités de carbone et le pouvoir de séquestration de l’agriculture est un enjeu majeur comme nous le rappelle le programme 4X1000 (lire ici). La valeur et l’existence même des paysages ruraux relèvent de la notion de bien commun de la société. Notre comptabilité nationale et celles des autres Européens ne sont pas aujourd’hui adaptées à la prise en compte de ce patrimoine naturel.»
Rétribuer les services rendus à l’environnement
« Notre proposition ouvre cette réflexion indispensable en demandant la création d’une prestation pour service environnemental ou écosystémique qui serait versée aux agriculteurs en fonction de leur contribution aux enjeux de transition pour lesquels la France et tous les autres pays européens ont pris des engagements devant les citoyens du monde. Dans le domaine des accords commerciaux, au-delà de l’absolue nécessité d’une concurrence loyale et équilibrée protégeant nos signes de qualité et d’origine, nous rappelons l’enjeu de préservation des relations commerciales avec la Grande-Bretagne. Je pense qu’il faudra aussi très vite mesurer les conséquences que pourraient avoir les ruptures profondes que les USA sont en train d’introduire dans les échanges mondiaux. Qu’en sera-t-il des conséquences pour l’agriculture française et pour les échanges agroalimentaires? »
« Pour terminer, conclut Franck Montaugé, que le budget de la PAC se maintienne ou pas, il y a nécessité de rendre souple et agile, pour plus d’efficience, les crédits correspondants, qu’ils soient affectés au premier ou au second pilier. La filière viticole a donné l’exemple il y a quelques années en réinterrogeant sa stratégie et son rapport à la PAC. L’exemple n’est peut-être pas transposable à toutes les filières mais il mérite d’être connu. Vigilance et responsabilité ont guidé les travaux de notre groupe de suivi et cette proposition de résolution européenne en est la parfaite illustration. Nous attendons maintenant, Monsieur le Ministre, de connaître comment le gouvernement français entend préserver les intérêts agricoles et agroalimentaires de la France, tout en ouvrant des perspectives nouvelles et réalistes pour soutenir durablement l’ensemble de ses agriculteurs et des territoires concernés. »