Invité à s’exprimer en ouverture de la réunion de concertation « Occitanie 2040 » organisée le 11 janvier dernier à Auch par la région Occitanie, le sénateur Franck Montaugé a salué le principe de la démarche de concertation pour élaborer le futur schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet). Ainsi qu’on peut le lire sur le site de la Région (voir ici), ce document prescriptif « doit fixer les objectifs de moyen et long termes en matière d’équilibre et d’égalité des territoires, d’implantation des différentes infrastructures d’intérêt régional, de désenclavement des territoires ruraux, d’habitat, de gestion économe de l’espace, d’intermodalité et de développement des transports, de maîtrise et de valorisation de l’énergie, de lutte contre le changement climatique, de pollution de l’air, de protection et de restauration de la biodiversité, de prévention et de gestion des déchets ». Un vaste programme pour l’élaboration duquel les acteurs de terrain et les citoyens sont consultés lors d’ateliers de concertation.
Devant les élus et responsables de la région Occitanie, Franck Montaugé s’est d’abord fait le défenseur d’une méthode pragmatique consistant à s’appuyer sur les expertises locales et sur les démarches prospectives déjà engagées, notamment dans le cadre du Scot* de Gascogne. « Cela fait maintenant plusieurs années que, dans ce département, les élus se sont regroupés et ont fait le choix de la construction d’un Scot quasi départemental permettant de répondre, dans le respect des territoires et de leurs projets, à la question du devenir du Gers à horizon de 15 à 20 ans » explique le sénateur du Gers. Le Scot de Gascogne est le plus grand Scot rural de France, ce qui nous permet d’aborder la démarche de planification stratégique territoriale dans ce département dans le même état d’esprit que celui qui est le vôtre concernant le Sraddet. Ces deux démarches, sans être identiques, sont très comparables et il est important qu’elles soient menées avec le souci de la cohérence d’ensemble. Je souhaiterais que nous puissions collaborer avec vous pour la partie gersoise du Sraddet dans le même état d’esprit, et en respectant la même façon de travailler que celle que nous (les élus gersois) avons adoptée jusqu’ici pour le Scot de Gascogne. » Ainsi les études et le diagnostic territorial qui ont été réalisés pour l’élaboration du Scot ont-ils naturellement vocation à alimenter la réflexion pour l’élaboration du Sraddet.
« Dans le même esprit, il faut que nos projets (qu’il s’agisse de projets de pays, d’intercommunalité, ou de projets communaux) et nos problématiques départementales soient pris en compte et discutés avec vous comme ils le sont dans le cadre des travaux du Scot de Gascogne, poursuit Franck Montaugé. Nous avons la chance d’avoir ces deux démarches, celle du Scot et celle du Sraddet, à mener en parallèle. Leurs calendriers ne se recouvrent certes pas, mais les approches territoriales sont tout à fait semblables. Il faut donc qu’il y ait une cohérence et un lien fort entre elles », dit-il.
Les spécificités gersoises
Dans la deuxième partie de son intervention, Franck Montaugé a évoqué « les problématiques qui concernent fortement le Gers ». La première d’entre elles concerne l’agriculture: « Le Gers est un département à l’économie essentiellement agricole avec une agriculture qui connaît des évolutions qui ne cessent de s’accentuer, explique Franck Montaugé. Parmi les aspects qui posent problème, il y a, dit-il, la question de la population agricole, de son devenir et de l’impact démographique que cela a directement sur le territoire. A un moment donné il était question que dans le cadre du Sraddet la problématique économique agricole soit prise en compte dans le cadre d’un plan qui s’appelait le plan régional d’agriculture durable. Il me paraît souhaitable que cette démarche dont je ne crois pas qu’elle ait été menée en Midi-Pyrénées comme elle l’a été dans d’autres régions comme le Languedoc-Roussillon, soit développée pour ce qui concerne l’économie agricole du département du Gers. »
« Nous avons également, ajoute Franck Montaugé, des problématiques d’eau liées au réchauffement climatique, mais pas seulement. Je sais, dit-il, que c’est un des points qui est pris en compte de manière importante dans votre approche et c’est une bonne chose. Un autre point qui me préoccupe énormément est le devenir de la politique agricole commune. Je me demande s’il ne faut pas aussi, quand on se projette à 2040, avoir une approche prospective différenciée en terme de scénarios par rapport à certains sujets qui peuvent évoluer dans un sens favorable comme dans un sens moins favorable. Et typiquement, c’est le cas de la PAC. La prochaine PAC c’est 2020 et au-delà. Les éléments sérieux que nous commençons à avoir en provenance de la Commission européenne sur les orientations de cette PAC, me laissent penser que l’on peut tomber sur du bon comme sur du pas bon du tout, avec des conséquences pour un territoire comme le nôtre tout à fait dommageables. Je pense que dans le cadre d’un exercice de planification territoriale comme le Sraddett, ce genre d’approche mérite au moins d’être envisagé si ce n’est d’être engagé. »
« Sur la question économique toujours, ce département doit absolument évoluer sur d’autres domaines que l’agriculture ou l’agroalimentaire. La filière de la sous-traitance aéronautique est en développement de manière intéressante. Je pense que les Gersois seront d’accord pour dire que c’est une voie qu’il faut privilégier dans le cadre des orientations économiques du Sraddet. Ce raisonnement vaut aussi pour les énergies renouvelables bien entendu. Enfin, il y a une filière qui n’a jamais ou très peu été exploitée dans ce département c’est celle du bois. J’ai bien noté qu’elle figurait en bonne place dans les orientations que vous souhaitez explorer et c’est une bonne chose. Des démarches particulières mériteraient également d’être soutenues comme celle, par exemple, du projet de parc naturel de l’Astarac. Cette région est caractérisée par de la ruralité voire de l’hyper ruralité et sa situation particulière, comme d’autres du même type dans le département, méritera d’être prise en considération dans le Sraddett. »
Une relation équilibrée avec la métropole
« L’autre grand enjeu de ce schéma pour notre département, c’est celui de la relation avec la métropole toulousaine, poursuit Franck Montaugé en troisième partie de son intervention. Cet enjeu est aussi l’une des raisons pour lesquelles nous nous sommes engagés dans la construction d’un Scot départemental. Je pense qu’il est fortement souhaitable que nous évitions le phénomène de la tache d’huile ou du Gers vase d’expansion de la croissance et du développement métropolitains. Nous avons absolument besoin des métropoles dans notre pays. Il faut donc qu’elles se développent, mais pas n’importe comment et pas au détriment des territoires périphériques comme le Gers à l’égard de la Haute-Garonne et de Toulouse. Nous avons des spécificités dans ce département, environnementales en particulier. On a une image extérieure positive pour tout un tas de raisons. Il faut que le Sraddet nous donne l’occasion de préserver ces richesses et nous permette de prendre appui sur ces atouts pour contribuer, nous aussi, au développement de la région Occitanie. »
« Nous devons nous positionner dans une relation mutuellement bénéfique, en particulier avec la métropole, en veillant à ce que la croissance économique et démographique se répartisse équitablement sur tout le département. Aujourd’hui l’une de nos problématiques majeures, dans le Gers, c’est un développement équilibré nous évitant de laisser certaines parties du territoire au bord du chemin avec des zones qui sont dans le pire des cas existants en voie de désertification. Ce qui se passe en ce moment avec la révision de la cartographie des zones défavorisées simples peut accentuer ce phénomène de désertification. On a plus de 100 communes qui étaient en zone défavorisées et qui n’y seraient plus, dont les exploitants, souvent des éleveurs, vont perdre le bénéfice des indemnités compensatoires de handicap naturel. Quand il n’y aura plus d’élevage sur ces territoires, il n’y aura plus rien du tout et nous serons confrontés à la question de l’entretien de ces paysages que plus personne ne pourra assumer sauf évidemment comme d’habitude, les collectivités qui seront alors elles aussi en difficultés. »
« Le département du Gers est complexe, conclut Franck Montaugé en s’adressant aux représentants de la région Occitanie. Il peut paraître simple vu de loin, en réalité il est complexe car aucun des territoires qui le composent ne ressemble à celui d’à côté. On en a distingué cinq quand on s’est lancé dans la démarche Scot de Gascogne. On a la prétention, nous élus de terrain, de bien connaître notre territoire. Et le débat contradictoire étayé par des éléments factuels est aussi le bienvenu. Appuyez-vous sur nous, appuyez-vous sur les études qu’on a déjà engagées en matière d’état des lieux et de dynamiques à l’œuvre pour mieux comprendre nos territoires, leurs problématiques. Il faut qu’on soit ensemble dans une démarche constructive qui serve les objectifs de développement et de réduction des inégalités que le conseil régional d’Occitanie s’est fixés et que je partage totalement sur le principe. »
* Scot: schéma de cohérence territoriale