Le sénateur Franck Montaugé est intervenu aujourd’hui dans le cadre du débat sur la politique industrielle et l’avenir de notre industrie en posant une question à Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Economie et des finances, concernant la vente par l’Etat de ses actions dans les entreprises Aéroport de Paris (ADP), Engie, et La Française des Jeux.
« Dans ses préconisations, la mission d’information de notre Chambre (1) appelle l’Etat à renouveler sa stratégie industrielle. Mais si nous considérons que la dynamisation de l’outil actionnarial peut être un levier possible pour servir cette nouvelle stratégie d’Etat, nous pensons que ce que vous vous apprêtez à faire avec la vente d’Aéroport de Paris, d’Engie et de la Française des jeux est un mauvais choix… dont la performance sera médiocre pour financer le soutien de l’innovation de rupture qui fera l’économie de demain. »
« Contrairement à ce qui a été dit au départ et que vous avez rappelé il y a quelques instants, ce n’est pas 10 milliards d’euros qui vont être affectés à ce soutien mais le produit des dividendes générés par le placement des actions que vous allez vendre. Comment, Madame la Ministre, justifiez-vous que les placements de ces 10 milliards produiront un rendement de 250 millions au mieux alors qu’aujourd’hui, et en prenant appui sur les chiffres des années passées, les actions de ces trois entreprises ont rapporté à l’Etat 850 millions au plus bas en 2017 et jusqu’à 1,5 milliard comme en 2012 … donc en fait autour de 1 milliard d’euros, ce qui en fait un placement exceptionnellement profitable. Donc un rendement supérieur à 10% aujourd’hui et de 2,5% demain ! Où est la bonne affaire pour l’Etat Madame la Ministre ? Alors oui, vous allez réintégrer immédiatement 10 milliards qui vous éviteront peut-être de passer en 2019 le cap symbolique des 100% de PIB de dette publique, mais qu’elle est la vraie logique de cette opération de vente et d’abandon de fleurons nationaux ? A qui profitera vraiment la spoliation, parce que c’en est une, des Français? »
« La logique que nous poursuivons c’est la logique de faire de l’Etat- un Etat stratège plutôt qu’un Etat gestionnaire » a répondu Mme Gény-Stephann. Nous préférons investir dans les technologies de demain plutôt que de rester actionnaires dans des entreprises qui, certes rapportent un rendement. Nous préférons utiliser le capital, l’argent des Français pour investir dans l’innovation de demain et venir en appui pour aller identifier ces nouvelles technologies qui positionneront nos industriels sur la croissance future. Il faut savoir qu’une part des recettes de l’Etat sur ces entreprises sera maintenue puisque la Française des Jeux continuera en particulier à générer de la recette fiscale, et d’autre part ces cessions d’actifs se produiront dans un cadre extrêmement sécurisé du point de vue de la régulation. Il s’agit d’un choix d’allocation de l’argent public vers d’autres priorités. »
« Vous n’avez pas du tout répondu à ma question Madame ! Vous avez compris que je ne suis pas favorable à ces privatisations dans de telles conditions d’incertitude et de piètre performance en réalité, a répondu Franck Montaugé à la secrétaire d’Etat. L’Etat va se priver de ressources importantes dans la longue durée. Pour éviter de revivre la calamiteuse opération des autoroutes de 2005, il faut que le produit des ventes de ces trois entreprises soit au moins égal à la somme actualisée sur très longue période du produit des dividendes auquel l’Etat va renoncer. C’est ce que nous regarderons avec attention. Et j’espère que vous saurez arrêter le processus de privatisation si vous ne pouviez y parvenir, pour préserver les intérêts de l’Etat, des clients de ces entreprises mais aussi ceux des propriétaires, les Français », conclut Franck Montaugé.