Saisi le 5 octobre dernier par les groupes LR et UDI du Sénat, le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision le 25 octobre (lire ici) en censurant 23 des 98 articles du projet de loi «pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saisine, durable et accessible à tous » (dit «Egalim»). Cette décision va bien au-delà de l’objet de la saisine initiale pour inconstitutionnalité qui concernait 5 articles (1er, 8,28,82 et 83). Elle amplifie les déceptions qui entourent cette loi en affaiblissant sa portée par la suppression de ces 23 articles.
En effet, la quasi-totalité des articles censurés visait à renforcer l’information des consommateurs et la traçabilité des produits alimentaires. Ces dispositifs portaient notamment sur le renforcement de l’étiquetage des denrées alimentaires (OGM, origine, mode d’élevage), l’obligation d’information lors de la vente en ligne de produits alimentaires ou encore sur l’obligation d’information du consommateur sur les lieux d’élevage des huîtres et d’affinage des fromages fermiers ou sur la provenance du vin et du miel. Autant de mesures introduites au Sénat ou à l’Assemblée Nationale et soutenues par les différents groupes comme indiqué dans le tableau ci-joint (lire ici).
“J’avais introduit au sénat en première lecture (voté à la quasi-unanimité) la demande faite au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur la mise en place d’une prestation pour services environnementaux (PSE), dont le but serait de valoriser les externalités positives de notre agriculture”, explique le sénateur Franck Montaugé. Cet article (12) a également été censurée par le Conseil consitutionnel en référence à l’article 45 de la Constitution qui stipule que « … tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ».
“Personnellement je ne partage pas les arguments qui fondent pour cet article comme pour de nombreux autres, la décision de censure du Conseil constitutionnel, estime Franck Montaugé. En effet, dit-il, si la PSE est un jour mise en œuvre, comme nous le souhaitons et en particulier sur les terroirs qui sortent des primes à l’herbe (ZDS-ICHN), elle aura un impact direct sur le revenu des agriculteurs et sur la qualité de l’alimentation pour les consommateurs, ces deux aspects ayant un rapport évident avec les deux objectifs de la loi Egalim. Elle est parfois d’ores et déjà intégrée dans les relations commerciales entre producteurs et transformateurs comme le démontrent en pratique les expériences Nataïs dans le Gers (lire ici) ou Vittel à propos de la qualité de l’eau.”
“A l’approche de la réforme de la PAC et de la nécessité de poursuivre l’évolution de notre modèle agricole, le signal envoyé au monde agricole n’est pas positif, poursuit M. Montaugé. On peut aussi s’interroger sur la nature même de la procédure de saisine du Conseil constitutionnel qui ne prévoit pas d’audition des pétitionnaires. Seul le Gouvernement (secrétariat général du Gouvernement et ministères concernés par le texte de loi) est consulté pour l’instruction.”
“Avec tout le respect dû à l’institution qu’est le Conseil constitutionnel et à ses membres éminents, le concept neuf de PSE, encore en cours d’étude par l’INRA et discuté avec les professions, aurait pu sans mal faire l’objet d’un rapport du Gouvernement. Malgré cette situation, l’instauration d’une PSE fera l’objet d’un Projet de proposition de résolution (PPR) que je présenterai au nom de mon groupe le 12 décembre prochain en séance. Cette démarche fait l’objet d’un article spécifique (lire ici).”