Dans le cadre de la préparation à l’examen des dépenses du projet de loi de finances 2022, le sénateur Montaugé a rendu son avis sur les crédits « Industrie », pour le compte de la commission des affaires économiques (CAE). Il a présenté son rapport aux membres de la CAE le mardi 23 novembre 2021.
Ce rapport revient tout d’abord sur les effets du budget adopté l’an dernier. Plus de cinq milliards d’euros avaient été dédiés, au cours de l’année 2021, au soutien d’urgence puis à la relance de l’industrie française. Ces crédits d’urgence et de relance ont globalement rempli leur rôle. L’activité industrielle a retrouvé un niveau proche de l’avant-crise, la trésorerie des entreprises a été relativement préservée grâce au prêts garantis par l’Etat (PGE) et l’impact sur l’emploi a été limité avec une perte de 2% de l’emploi industriel total sur la période alors que l’activité avait pu chuter jusqu’à 40%.
Toutefois, ce constat est à nuancer. En effet, le comité d’évaluation de la relance soulève par exemple que les objectifs de moyen-terme affichés, comme la transformation de l’industrie et la décarbonation sont passés au second plan. Des projets sans lien avec ces objectifs, voire même en dehors du secteur industriel, ont été financés. Les critères d’éligibilité étaient parfois très différents d’une région à l’autre. En outre, l’épuisement des enveloppes de relance ne doit pas conduire à un arrêt trop brutal du soutien public qui provoquerait une rechute alors que le secteur industriel reste encore fragilisé.
En sus de la nécessaire transformation numérique des entreprises, le sénateur Montaugé a ensuite pu développer les quatre grands défis à relever en 2022 pour consolider l’activité industrielle.
- Premièrement, deux des secteurs prépondérants de l’industrie française sont encore en berne : l’automobile et l’aéronautique. L’aéronautique doit faire face à une restriction de la demande et un futur incertain. L’automobile doit transformer la chaîne de valeur liée au moteur électrique et répondre à une crise d’offre en raison des pénuries de composants essentiels (comme les semi-conducteurs) qui renforce les interrogations sur la dépendance aux importations et la vulnérabilité des capacités de production.
- Deuxièmement, la flambée des prix de l’énergie. Le prix du carbone a été multiplié par 2 en un an et demi, et celui de l’électricité par 4… Cette explosion bouleverse les modèles d’approvisionnement et pèse lourd sur les coûts des entreprises. La pérennité de certaines d’entre elles est fortement questionnée.
- Troisièmement, la filière industrielle connait toujours d’importantes difficultés de recrutement. 80 000 postes seraient aujourd’hui à pourvoir et 44% des entreprises déclarent peiner à trouver des employés. Bien que les embauches aient fortement repris, la situation reste tendue et pourrait contraindre encore la reprise.
- Enfin, il est possible que dans certains cas, les mesures d’urgence et de relance n’aient fait que décaler les difficultés des entreprises ce qui induirait pour l’année 2022 une augmentation des faillites, voire des fermetures de site… que l’on constate déjà hélas !
Face à ces défis, Franck Montaugé déplore que la proposition budgétaire du Gouvernement se traduise par un retour à l’ordinaire, comme si la reprise était acquise. La preuve principale étant que les crédits de la mission « Economie » renouent avec la baisse.
Le Gouvernement n’anticipe donc pas correctement les nécessaires restructurations des filières, la gestion des éventuelles faillites et l’accompagnement des entreprises au moment du « débranchement » des aides en ne dédiant pas de moyens humains supplémentaires. Il n’y a pas de budget additionnel non plus pour mettre en œuvre les contrats de filière. Pas d’abondement ni de pérennisation des actions du plan de relance qui ont fait leurs preuves et répondent, même hors crise, à de vraies défaillances de marché. Pas de crédits nouveaux non plus pour financer les actions menées au niveau territorial. Pas de politique cohérente et concrète en matière d’appui aux plans de formation des personnels qui permettent de garantir l’attractivité de l’industrie, la transmission des savoir-faire et la constitution d’une base de compétences nécessaire à la réindustrialisation.
À la place, le Gouvernement présente un énième grand plan dont l’absence d’évaluation des précédents n’a pas permis de corriger les erreurs d’orientation. Il est plus guidé par des opportunités ponctuelles que par une stratégie globale. Le sénateur Montaugé regrette enfin l’absence de vision stratégique pour la réindustrialisation et la décarbonation de l’économie. Après analyse, ce budget manque selon lui « d’ambition en matière de transformation stratégique durable de l’industrie française », échouant ainsi à répondre aux défis de transformation et de compétitivité qui se présentent à elle et à notre pays.
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