Mercredi 17 mai 2023, la commission des affaires économiques du Sénat auditionnait M. Philippe Baptiste, président du Centre National des Études Spatial (CNES). Cette audition intervient presque 2 ans après la nomination de M. Baptiste à ce poste pour laquelle la commission des affaires économiques s’était prononcée (voir ICI).
À cette occasion, le sénateur Franck Montaugé lui a réitéré sa remarque quant aux faiblesses patentes de la réglementation du domaine spatial. Pour rappel, celui-ci n’est régi à l’échelle internationale que par des textes liminaires comme le Traité de l’Espace des Nations Unies (1967).
Le relatif vide juridique qui le caractérise permet aux opérateurs de lancer des satellites sans réel contrôle ni anticipation des conséquences sur le long-terme. L’orbite terrestre basse, dans laquelle évoluent la plupart des satellites non géostationnaires, devient un lieu d’encombrement et de surabondance d’appareils. Cette situation pose dès aujourd’hui des problèmes de sécurité notamment par risque de collision lors du lancement de nouveaux satellites mais questionne surtout l’organisation et les impacts environnementaux de notre activité spatiale.
Le sénateur Montaugé a ainsi interrogé M. Philippe Baptiste sur l’importance de cette problématique à l’égard des organismes compétents, en vue de potentiels projets de régulation ou de réglementation.
Le président du CNES lui a répondu que la désorbitation n’est en effet pas imposée réglementairement. Reposant sur la volonté des opérateurs, elle n’est que très peu pratiquée en raison de son coût conséquent. Au travers de sa réglementation nationale, depuis la loi relative aux opérations spatiales de 2008, la France fait cependant des efforts notables en imposant un certain nombre de contraintes aux opérateurs lançant de Kourou donc en premier lieu à l’Agence Spatiale Européenne. Au travers de celle-ci, l’Union Européenne s’intéresse d’ailleurs de plus en plus à la législation spatiale et dit vouloir s’impliquer prochainement dans un « droit de l’espace ». Selon M. Baptiste, le cadre de discussion se situe cependant à un niveau supra-européen impliquant les Nations-Unies, en particulier les grandes puissances spatiales.
Franck Montaugé a poursuivi sa question sur l’impact environnemental de l’industrie spatiale. M. Baptiste a reconnu ici une responsabilité tout en relativisant cette incidence… mais en omettant la question des déchets dans l’espace des orbites basses. Pour l’impact climatique seul, l’ensemble des lancements spatiaux dans le monde ne représenterait en effet que quelques heures de trafic aérien international.
« Commun » de l’humanité mêlant des intérêts supra-nationaux, l’utilisation de l’espace doit nécessairement être régulée pour en garantir une viabilité de long-terme. Le lancement individuel de satellite ne peut se faire sans prise en compte de la constellation d’appareils gravitant aujourd’hui en orbite basse. C’est face à ce constat que divers observateurs appellent à une approche commune pour une régulation d’ensemble des activités spatiales.