Le sénateur Franck Montaugé salue l’initiative de l’aéroport Auch-Gers qui a permis d’accueillir pendant une semaine à Auch une délégation d’une quinzaine de dirigeants d’aéroports africains. Cette formation encadrée par la société Logyx, spécialiste de la formation dans le domaine de la sûreté, s’est déroulée sur le site même de l’aéroport, avec le concours de la société Eforsa, centre de formation pour pompiers d’aéroport. « Proche de Toulouse, la plate-forme aéroportuaire d’Auch est un site idéal pour développer des activités liées à la formation. Le succès de l’entreprise Eforsa en donne une parfaite illustration. Cela ouvre des perspectives très intéressantes pour Auch et son agglomération », se félicite Franck Montaugé, vice-président de la commission des affaires économiques du Sénat. « Notre souhait est de développer ce type d’activité et nous espérons accueillir prochainement d’autres formations similaires », confirme Grégory Mérelo, le directeur de l’aéroport.
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Privatisations: quelle stratégie pour quel bénéfice national?
Dans le cadre des discussions du projet de loi de finances 2019, le sénateur du Gers Franck Montaugé est intervenu ce vendredi à plusieurs reprises pour s’opposer au projet de la vente de trois fleurons de l’économie française: Aéroport de Paris (ADP), Engie (ex-GDF Suez), et la Française des jeux (FDJ).
« Je vais utiliser les quatre petites minutes disponibles pour aborder la question importante de la stratégie industrielle de l’État qui devrait être au cœur des crédits de la mission Economie. Et je vais le faire en évoquant une opération à 10 milliards d’euros ! Dans leur récent rapport de mission d’information, nos collègues Chatillon et Bourquin appellent l’État à renouveler sa vision stratégique en faveur de l’industrie. Nous souhaitons avec eux la dynamisation de l’outil actionnarial de l’État. »
« Dans ce cadre, la vente d’Aéroport de Paris, d’Engie et de la Française des jeux nous apparait comme un mauvais choix dont la performance sera médiocre pour financer le soutien de l’innovation qui fera l’économie de demain. Financement au demeurant nécessaire et dont nous partageons avec vous le nécessité et l’urgence. Cette opération est opaque et aucune explication fournie jusqu’ici par les membres du Gouvernement interrogés n’a été de nature à nous convaincre de sa pertinence. »
« Contrairement à ce qui a été dit au départ, ce n’est pas 10 milliards d’euros qui vont être affectés à ce soutien mais le produit des dividendes générés par le placement des actions que vous allez vendre. Comment, madame la Ministre, justifiez-vous que les placements de ces 10 milliards produiront un rendement de 250 millions au mieux alors qu’aujourd’hui, et en prenant appui sur les chiffres les plus bas des années passées, les actions publiques de ces trois entreprises ont rapporté à l’État 850 millions au plus bas en 2017, et jusqu’à 1,5 milliard comme en 2012… donc, en fait, autour de 1 milliard d’euros, ce qui en fait un placement exceptionnellement profitable ? Alors oui, vous allez réintégrer immédiatement 10 milliards qui vous éviteront peut-être de passer le cap symbolique des 100% de PIB de dette publique, mais qu’elle est la vraie logique de cette opération de vente et d’abandon de fleurons nationaux ? A qui profite-t-elle vraiment?
« Dans ces conditions d’incertitude et de risques, nous ne sommes pas favorables à ces privatisations. Pour éviter de revivre la calamiteuse opération des autoroutes de 2005, il faut que le produit des ventes de ces trois entreprises soit au moins égal à la somme actualisée sur très longue période du produit des dividendes auquel l’État va renoncer. A cet égard, comment allez-vous procéder et quels sont vos objectifs ? Rien dans les crédits de la mission ne nous permet de l’appréhender.
« Toujours sur ce sujet des privatisations, vous avez annoncé envisager de monter au capital d’EDF, dans le cadre de la donne nouvelle qu’induit la PPE et la montée en charge indispensable des énergies renouvelables. La grande entreprise qu’est EDF ne doit pas être sacrifiée comme l’ont été d’autres secteurs de la production industrielle française. Ce qui s’est passé avec Alsthom, avec AREVA nous fait craindre l’amorce d’un démantèlement de la filière nucléaire intégrée française. Il y va de notre souveraineté nationale, du rôle et de la place géopolitique de la France en Europe et dans le monde de l’énergie. Il y va aussi du savoir-faire de très haut niveau de centaines de milliers d’emplois directs et indirects.
« Faute, à ce stade, de clarté dans votre stratégie, les inquiétudes sont fortes. Va-t-on vers un démantèlement de l’entreprise aujourd’hui intégrée et une revente à la découpe ? Je pense à RTE par exemple. Quelle place pour les énergies renouvelables, à côté du nucléaire et de l’hydraulique ? Et en lien direct avec le budget 2019, quel sera le niveau des nouvelles prises de participation et comment seront-elles financées dans le contexte d’endettement fort que nous constatons et qui continue à s’accroitre tendanciellement ? Autant de questions … et de réponses Madame la Ministre qui détermineront, avec la prise en compte ou pas de nos amendements, le vote de notre groupe », conclut Franck Montaugé.
« L’Etat va perdre de l’argent sur ce projet »
Plus tard dans la journée, lors de la discussion du Projet de loi de finances « Mission Remboursements et dégrèvements », « Mission Engagements financiers de l’Etat », et « Mission Investissements d’avenir », le sénateur Montaugé a de nouveau fait part de son incompréhension au secrétaire d’Etat chargé du Numérique Mounir Mahjoubi:
« Nous sommes toujours dans l’attente, Monsieur le Ministre, d’une explication sur cette opération à 10 milliards d’euros. Avec la vente de ces actions dans ces trois entreprises, on passe d’une situation avec un rendement de l’ordre de 10%, voire plus si on se réfère aux produits des années antérieures, à un rendement de l’ordre de 2,5%. Où est le sens de cette opération pour l’Etat ? », interroge Franck Montaugé.
« Si on résume les choses en quelques mots, dit-il, on est dans une situation où, à partir de la huitième année après l’opération de vente de ces actions, voire la neuvième au pire, l’Etat va perdre de l’argent par rapport à la situation actuelle. Moi, je n’arrive pas à comprendre l’économie de ce projet de privatisation. Au-delà du sens économique qui interroge, quelle est la stratégie de l’Etat ? » demande-t-il encore avant de dire à nouveau son souhait qu’au travers des amendements proposés, l’opération de vente de ces actions soit annulée le temps que des explications convaincantes aient pu être fournies.
Sur le même sujet voir ici l’intervention de Franck Montaugé du 3 octobre dernier
Ventes par l’Etat d’AdP, d’Engie et FdJ: «Pas à n’importe quelles conditions ! »
Le sénateur Franck Montaugé est intervenu aujourd’hui dans le cadre du débat sur la politique industrielle et l’avenir de notre industrie en posant une question à Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Economie et des finances, concernant la vente par l’Etat de ses actions dans les entreprises Aéroport de Paris (ADP), Engie, et La Française des Jeux.
« Dans ses préconisations, la mission d’information de notre Chambre (1) appelle l’Etat à renouveler sa stratégie industrielle. Mais si nous considérons que la dynamisation de l’outil actionnarial peut être un levier possible pour servir cette nouvelle stratégie d’Etat, nous pensons que ce que vous vous apprêtez à faire avec la vente d’Aéroport de Paris, d’Engie et de la Française des jeux est un mauvais choix… dont la performance sera médiocre pour financer le soutien de l’innovation de rupture qui fera l’économie de demain. »
« Contrairement à ce qui a été dit au départ et que vous avez rappelé il y a quelques instants, ce n’est pas 10 milliards d’euros qui vont être affectés à ce soutien mais le produit des dividendes générés par le placement des actions que vous allez vendre. Comment, Madame la Ministre, justifiez-vous que les placements de ces 10 milliards produiront un rendement de 250 millions au mieux alors qu’aujourd’hui, et en prenant appui sur les chiffres des années passées, les actions de ces trois entreprises ont rapporté à l’Etat 850 millions au plus bas en 2017 et jusqu’à 1,5 milliard comme en 2012 … donc en fait autour de 1 milliard d’euros, ce qui en fait un placement exceptionnellement profitable. Donc un rendement supérieur à 10% aujourd’hui et de 2,5% demain ! Où est la bonne affaire pour l’Etat Madame la Ministre ? Alors oui, vous allez réintégrer immédiatement 10 milliards qui vous éviteront peut-être de passer en 2019 le cap symbolique des 100% de PIB de dette publique, mais qu’elle est la vraie logique de cette opération de vente et d’abandon de fleurons nationaux ? A qui profitera vraiment la spoliation, parce que c’en est une, des Français? »
« La logique que nous poursuivons c’est la logique de faire de l’Etat- un Etat stratège plutôt qu’un Etat gestionnaire » a répondu Mme Gény-Stephann. Nous préférons investir dans les technologies de demain plutôt que de rester actionnaires dans des entreprises qui, certes rapportent un rendement. Nous préférons utiliser le capital, l’argent des Français pour investir dans l’innovation de demain et venir en appui pour aller identifier ces nouvelles technologies qui positionneront nos industriels sur la croissance future. Il faut savoir qu’une part des recettes de l’Etat sur ces entreprises sera maintenue puisque la Française des Jeux continuera en particulier à générer de la recette fiscale, et d’autre part ces cessions d’actifs se produiront dans un cadre extrêmement sécurisé du point de vue de la régulation. Il s’agit d’un choix d’allocation de l’argent public vers d’autres priorités. »
« Vous n’avez pas du tout répondu à ma question Madame ! Vous avez compris que je ne suis pas favorable à ces privatisations dans de telles conditions d’incertitude et de piètre performance en réalité, a répondu Franck Montaugé à la secrétaire d’Etat. L’Etat va se priver de ressources importantes dans la longue durée. Pour éviter de revivre la calamiteuse opération des autoroutes de 2005, il faut que le produit des ventes de ces trois entreprises soit au moins égal à la somme actualisée sur très longue période du produit des dividendes auquel l’Etat va renoncer. C’est ce que nous regarderons avec attention. Et j’espère que vous saurez arrêter le processus de privatisation si vous ne pouviez y parvenir, pour préserver les intérêts de l’Etat, des clients de ces entreprises mais aussi ceux des propriétaires, les Français », conclut Franck Montaugé.
Suppression des emplois d’Engie: « L’Etat actionnaire doit agir pour la relocalisation! »
Mardi 31 juillet, lors de la séance des questions au Gouvernement, le sénateur Franck Montaugé a posé une question à Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Economie et des Finances, concernant la stratégie « relations clients » du groupe Engie.
« Depuis 10 ans, le groupe Engie a fermé 19 de ses 32 sites de Relation clients, supprimé 1000 emplois et il a externalisé 85% de ses activités clientèle dont 30% à l’étranger. Cette hémorragie s’est encore accélérée depuis 2 ans par des délocalisations au Cameroun et au Sénégal, après le Maroc, le Portugal et l’île Maurice. Près de 3000 emplois sont actuellement menacés par cette stratégie de délocalisation vers des pays à bas coûts de main-d’œuvre. Ces délocalisations généreront des économies dérisoires – de l’ordre de 7 millions d’euros – à comparer aux 1,4 milliard d’euros de bénéfices réalisés par le groupe en 2017. Ceci dans le cadre d’un marché de 11 millions de clients générant 6 milliards d’euros de chiffre d’affaire. »
« De surcroit, ajoute Franck Montaugé, cette stratégie fait fi de la dimension humaine du sujet. Elle prévoit par exemple la formation du personnel à l’étranger par ceux-là mêmes qui demain verront leur emploi en France supprimé ! Ces milliers d’emplois sont pourtant souvent indispensables à l’économie locale française et à la cohésion des territoires. Certains de ces territoires seront considérablement affaiblis par la disparition de ces centres de Relation clients et de leurs emplois. »
« Lors d’une récente audition par la commission des affaires économiques du Sénat, Mme Kocher, directrice générale d’Engie, a indiqué aux commissaires, je cite, qu’ « il n’y pas d’avenir pour la relation clients ». Comment faut-il comprendre cette déclaration ? Quelle appréciation l’État, actionnaire principal à hauteur de 24,1% du capital et qui détient 28,1% des droits de vote, porte-t-il sur cette stratégie d’entreprise ? Faut-il comprendre qu’Engie s’apprête à vendre ce portefeuille de 11 millions de clients dans le cadre par exemple de l’entrée de nouveaux partenaires au capital en compensation du retrait de l’Etat comme pourrait le permettre in fine la loi Pacte ? Enfin, quelles mesures l’Etat compte-t-il prendre pour préserver l’emploi de ces activités de Relation clients en France pour relocaliser ces activités en France ? »
« Avant de vous répondre sur le fond, sachez que l’État est particulièrement attentif à la dimension sociale de la transformation en cours du groupe Engie, a déclaré en préambule à sa réponse la secrétaire d’Etat. À cet égard, dit-elle, il faut signaler que le groupe a signé en avril 2016, avec trois fédérations syndicales européennes, un accord impliquant qu’une offre d’emploi au sein du groupe soit proposée à tout salarié concerné par des réorganisations. Cet accord prévoit en outre un important effort de formation. »
« Sur le fond, poursuit la ministre, la décision d’Engie d’externaliser une partie de son service client résulte d’une intensification de la concurrence sur ses marchés, en lien avec la dérégulation des marchés de l’énergie. Le groupe a traversé une crise profonde jusqu’en 2016, à l’image des énergéticiens européens. Les entreprises possédant un large portefeuille clients sont confrontées à la nécessité de réduire leurs coûts tout en proposant un service en ligne avec les standards actuels, reposant sur les technologies numériques et une approche multicanal. Elles procèdent à une externalisation croissante des formes d’interaction avec la clientèle, avec des opérateurs basés à l’étranger proposant des prestations moins onéreuses sur une plage calendaire et horaire élargie et, parallèlement à cela, au déploiement d’outils avancés de CRM intégrant l’apport de nouvelles technologies faisant appel notamment à l’intelligence artificielle.
« Ce double mouvement d’externalisation des activités à faible valeur ajoutée et de recours croissant à des éditeurs de solutions et entreprises de service numérique spécialisées s’inscrit dans la transformation numérique du processus. Les entreprises françaises spécialisées dans la relation client tiennent, avec la transformation numérique, l’occasion de rebondir. Le groupe Engie a ainsi tout récemment confié à des sociétés françaises l’intégration de la relation client numérique multicanal dans son système d’information. Dans ce contexte, les professionnels concernés et le Gouvernement travaillent au renforcement des atouts de nos entreprises et plus généralement à l’attractivité de notre pays », conclut Mme Gény-Stephann.
« Où est la dimension humaine dans la position que vous venez d’exprimer en tant que représentante de l’actionnaire majeur qu’est l’Etat français? Où est la dimension territoriale dans la politique que vous venez de nous exposer?, s’interroge le sénateur du Gers en réponse à la ministre. Une fois de plus, hélas, je constate que la question financière, la question de la rentabilité du capital prime sur toute autre considération, et c’est dommage. »
« L’Etat est aujourd’hui en situation de faire cesser les délocalisations abusives et il peut, s’il le veut, initier la relocalisation de ces emplois en France. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication pourraient tout à fait être mises en oeuvre sur le territoire national en même temps que l’emploi serait préservé et également l’économie de ces territoires. En 2017 en Italie, 13 grandes entreprises ont signé avec le gouvernement italien un protocole limitant à 20% les délocalisations des centres d’appels. Engie pourrait mettre en œuvre en France un code de bonne conduite comparable, avec l’ensemble des acteurs. C’est ce que nous demandons à l’Etat actionnaire d’impulser. Il en les moyens politique s’il le veut, et je souhaite qu’il le veuille. »
Economie: « Il faut garantir le pluralisme des idées dans la recherche et l’enseignement »
Lors de la séance des questions orales du 3 juillet dernier, le sénateur Franck Montaugé s’est adressé à la ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation pour attirer son attention sur le mode de recrutement actuel des professeurs et des directeurs de recherche dans le domaine de l’économie. « Actuellement, le mode de recrutement marginalise les économistes qui ne s’inscrivent pas dans le cadre de la pensée économique dominante, encore dite orthodoxe ou mainstream. Il y a là un sujet d’importance, parce que la tradition hétérodoxe française en économie est riche en diversité et a toujours participé au rayonnement international de la France. Certains de ses représentants avaient anticipé la crise financière de 2007-2008. Les deux rapports de missions rendus en 2001 et 2014 préconisent que l’enseignement soit incarné dans les faits, les politiques, l’histoire et les débats de société et qu’il soit proposé aux étudiants de premier cycle une formation pluridisciplinaire, avec spécialisation progressive, et plus tournée vers la compréhension des faits et des institutions économiques. Aujourd’hui, ce défaut de pluralisme se traduit aussi par une concentration des flux financiers vers les universités et les laboratoires approfondissant la pensée dominante, ce qui renforce également les inégalités territoriales.
« Pour toutes ces raisons, ajoute Franck Montaugé, de nombreux universitaires, notamment au sein de l’Association française d’économie politique, l’AFEP, proposent la création d’une nouvelle section, qui serait intitulée Economie, société et territoire, du Conseil national des universités, afin de valoriser les perspectives pluridisciplinaires et institutionnalistes dans l’enseignement de l’économie. Ces économistes proposent également de créer une nouvelle section, Economie et sociétés, au sein du Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, pour favoriser le pluralisme et la pluridisciplinarité de la recherche en économie. Sachant qu’un projet de décret dans ce sens a été élaboré, j’aimerais savoir, madame la ministre, quelles suites vous comptez donner à cette démarche. »
Pour Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, « la recherche en économie, qu’il s’agisse de micro-économie ou de macro-économie, a vocation à confronter les théories aux faits pour faire progresser la connaissance. À cette fin, tous les paradigmes de la discipline doivent pouvoir se confronter sur le terrain scientifique, et cela sans intervention politique. Une fois ce constat établi, vous conviendrez que la notion d’orthodoxie a peu de sens. À cet égard, la recherche française en économie est dynamique, et cela est reconnu à l’échelle internationale », dit-elle encore, rappelant que « Jean Tirole a reçu le prix de la Banque royale de Suède en mémoire d’Alfred Nobel en 2014, soit l’équivalent du prix Nobel en économie ».
« Sur le fond, poursuit la ministre, la recherche économique actuelle s’illustre en France et dans son cadre institutionnel actuel par une ouverture croissante à l’interdisciplinarité, notamment aux apports des sciences humaines et sociales. Ce qui est vrai des sciences humaines l’est également des sciences exactes, le lien entre l’économie, les sciences cognitives ou les mathématiques n’étant plus à prouver. Dans ces conditions, dit-elle, la création d’une nouvelle section, qui serait dédiée à l’économie hétérodoxe au sein du CNU ou du CNRS, n’aurait aucune plus-value. Il faut veiller à ce que le pluralisme devienne la règle, ce qui ne fera pas en séparant les tenants des différentes doctrines. Permettez-moi de rappeler également qu’il existe à l’heure actuelle plus d’une trentaine de sections du CNU dédiées aux sciences humaines et sociales. C’est également le cas au CNRS, qui comporte plusieurs sections. Là encore, il s’agit non pas de cristalliser telle ou telle théorie par rapport à telle autre, mais bien de garantir à chacun de pouvoir exercer son métier de scientifique, qui est de confronter les faits aux théories, afin de faire progresser la connaissance.
« C’est dans ce sens, ajoute Mme Vidal, que Pierre-Cyrille Hautcoeur, directeur d’études en économie à l’École des hautes études en sciences sociales, l’EHESS, a remis en 2014 à Geneviève Fioraso un rapport relatif à l’enseignement de l’économie en France, rapport qui émettait déjà un avis négatif sur cette proposition. Cet avis a été confirmé par Jean Tirole, qui a eu l’occasion de s’exprimer publiquement sur ce sujet. S’agissant de l’ouverture pluridisciplinaire du premier cycle universitaire en économie, cette filière bénéficiera comme les autres de la mise en œuvre de l’enseignement modulaire et capitalisable dans les conditions prévues par la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, mais aussi par le projet du nouvel arrêté de licence en cours de rédaction. Ce nouveau cadre légal et réglementaire permettra à tous les étudiants en économie d’enrichir leur formation au contact d’autres disciplines.
« Je ne partage presque aucun des arguments que vous avez développés ; j’y vois même des contradictions » a répondu Franck Montaugé. « Vous citez Jean Tirole, éminent économiste ayant fait briller dans sa discipline les couleurs de la France. Celui-ci s’inscrit dans une démarche d’économistes tout à fait respectables, mais qui relève de la pensée dominante en la matière. On a plus que jamais besoin, y compris pour notre démocratie, de pluralisme en matière de recherche et d’enseignement. Or le chemin que vous proposez n’est pas de nature à nous doter de tous les moyens nécessaires pour avancer sur cette question. L’économie ne trouve pas en elle-même ses justifications. Comme d’autres, je pense que c’est la politique qui préside aux choix de société. Évidemment, l’économie a ses règles, ses paradigmes, comme vous l’avez dit, mais, encore une fois, la diversité et le pluralisme des expressions sont de nature à nous faire progresser.
Pour le sénateur du Gers, « l’organisation de nos sociétés, en particulier leur politique économique, ne passera pas par un seul chemin. C’est tout l’enjeu de la reconnaissance de ce courant dit hétérodoxe dont nous avons besoin. Je le dis d’ailleurs sans porter de jugement de valeur sur les paradigmes et les principes que ses tenants mettent en avant. Cette reconnaissance est essentielle pour la vitalité de nos démocraties, et pas seulement la nôtre, puisque cette question s’inscrit dans un vaste espace, européen et mondial », conclut Franck Montaugé.
Le Sénat pour de nouveaux outils de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs
Le Sénat a voté à l’unanimité le 14 juin dernier la proposition de loi actant le pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs présentée par le sénateur socialiste Martial Bourquin et le sénateur LR Rémy Pointereau et co signée par plus de 200 sénateurs de toutes tendances. Ce texte (lire ici) propose aux élus locaux une palette complète d’outils pour revitaliser leurs centres-villes. Il s’agit de repeupler les centres, d’y favoriser le retour de l’activité et des services publics, et en finir avec la culture des périphéries.
Les deux amendements que le sénateur Franck Montaugé a défendus pour que le dispositif soit accessibles à toutes les communes quelles que soient leurs tailles (lire ici et ici), contre l’avis de la commission et contre l’avis du Gouvernement, ont été rejetés. « Je souhaitais que ce texte dont je suis cosignataire soit cohérent avec l’exposé des motifs indiquant qu’il concernait toutes les communes, explique Franck Montaugé. Commission et gouvernement les ont rejetés. Donc ne seront éligibles (si le texte va au bout des navettes) que les communes répondant aux notions de centres-villes et bourgs-centre et aux critères du paragraphe III de l’article 1, ce que je regrette », dit-il.
Si toutes les communes de France ne pourront avoir accès au dispositif, ce texte est très positif et il faut souligner que les opérations de sauvegarde économique et de redynamisation «OSER » sont bien plus larges que l’action cœur de ville du gouvernement qui ne concerne que 222 villes quand près de 600 à 700 communes sont en difficulté. Tous les territoires sont en effet concernés ; un amendement du groupe socialiste permet également de prendre en compte les spécificités des territoires ultramarins.
Si ce texte arrivait au terme de la navette parlementaire, ce qui est peu probable aux dires du ministre lui-même, les élus pourraient mener une véritable politique des centralités : moratoires locaux sur les implantations commerciales, abaissement des seuils d’autorisation d’exploitation en périphérie, meilleure évaluation des projets commerciaux pour prendre en compte leur impact sur le tissu commercial du centre-ville. La question du patrimoine a également été au cœur des débats pour trouver le juste équilibre entre protection et revitalisation des centres.
Enfin, des mesures d’incitation fiscale favoriseraient une offre locative diversifiée et adaptée aux besoins d’une population désireuse de réinvestir les centres-villes. Patrice Joly l’a rappelé, « le volet fiscal de ce texte est tout à fait essentiel pour rééquilibrer les coûts entre les centres-villes et leurs périphéries et dégager des ressources au profit des collectivités ». Dans ce sens, la création d’une contribution pour la lutte contre l’artificialisation des sols et la taxation des GAFA soutenues par le groupe socialiste, sont des innovations majeures. Comme souligné par le sénateur Xavier Iacovelli, « nos villes et villages affrontent un danger commun : la dévitalisation. C’est une urgence à laquelle répond ce pacte national ».
Fait assez exceptionnel, le texte a été voté à l’unanimité par le Sénat et le ministre a indiqué que certaines points, intéressants selon lui, pourraient être rediscutés dans le cadre des débats prochain de la loi Elan consacrée au logement et l’aménagement numérique. Dommage ! Ce sujet de la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs méritait de prospérer pour son objet propre.