Au terme de près de 5 heures de débat, le sénat a adopté mardi par 285 voix pour, 19 contre et 28 abstentions la proposition de loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communauté de communes.
« J’ai voté, avec mon groupe, pour ce texte (lire ici) profondément amendé par la commission du développement afin de maintenir de façon permanente le caractère optionnel des compétences eau », explique Franck Montaugé. Le texte voté à l’Assemblée nationale prévoyait qu’au plus tard le 1er janvier 2026 le transfert de compétence soit effectif et que le seuil minimum d’EPCI se substituant aux communes dans les syndicats de gestion de l’eau soit abaissé à 2 pour que les syndicats existants aujourd’hui puissent être maintenus. A cette obligation de transfert de compétence était associée la possibilité d’une minorité de blocage au niveau de l’EPCI (25% des communes représentant 20% de la population).
Le texte voté hier supprime la date butoir du 1er janvier 2026. Les transferts éventuels se feront donc sur une base de projet délibérée entre élus. La minorité de blocage est maintenue. La faculté de procéder à des transferts par compétences séparées a été introduite (transfert de l’eau et pas de l’assainissement par exemple). Compte tenu de sa spécificité, la gestion des eaux de ruissellement et de pluie peut être traitée séparément de l’eau potable et des eaux usées en restant au niveau de la commune par exemple.
Maintenant, comme nous sommes en procédure accélérée (une seule navette) et que le texte voté hier au sénat est différent de celui issu de l’Assemblée nationale, une commission mixte paritaire (CMP) va permettre aux deux chambres de s’accorder sur une version commune.
« Mon pronostic, explique Franck Montaugé, est que c’est peu probable que nous y parvenions, le Sénat étant attaché au principe de libre administration des collectivités illustré ici par la suppression de l’obligation de transfert, les élus pouvant décider de ce qu’ils jugent le mieux pour leurs territoires et les usagers. A l’issue de la CMP, dit-il, l’Assemblée nationale aura le dernier mot et le texte final, sauf surprise résultant d’un changement de doctrine du gouvernement, rétablira la date butoir du 1erjanvier 2026 pour transférer la compétence, avec possibilité d’ici là d’activer la minorité de blocage qui sera maintenue. »
« Après avoir participé au groupe de travail du gouvernement (lire ici), je suis intervenu hier à la tribune du Sénat pour présenter les positions de mon groupe, cohérentes avec le texte voté et la proposition de loi que le sénat avait voté à l’unanimité sur le même sujet en février 2017:
« Dans cet hémicycle, nous en appelons souvent à la nécessité de simplifier notre législation, à la rendre plus facilement compréhensible et applicable pour les élus locaux qui la mettent en œuvre et en mesurent les effets. Des effets qui ne sont pas toujours positifs ou conformes aux intentions initiales du législateur. Parce que les élus le demandaient, le gouvernement a donc engagé un travail de simplification de la loi NOTRe pour son volet « eau et assainissement ». C’est une bonne initiative ! … le groupe socialiste et républicain a fait des propositions constructives au sein du groupe de travail.
A l’écoute de nos territoires et de leurs élus, nous avons fait valoir les principes et positions suivants :
- Desserrer la contrainte de la loi en abaissant le seuil minimum du nombre d’EPCI regroupés en syndicat de 3 à 2. Cette disposition évitera de supprimer des structures qui ont parfois fait la démonstration de leur efficacité et qu’il est souhaitable de préserver dans leur organisation actuelle.
- Laisser aux élus locaux le temps de procéder à des études technico-économiques sur un horizon de temps pluriannuel, selon des scénarii multiples intégrant les dépenses et recettes actualisées des différents postes de coûts. Ces études permettent d’apprécier dans le temps le niveau et les évolutions du prix et de la qualité du service rendu et de choisir in fine le scénario optimum pour l’usager.
- Et pour permettre aux élus de mener à bien ces études repousser l’échéance butoir pour le transfert de compétence à 2026, en gardant jusque-là le caractère optionnel de ces compétences.
- Nous sommes donc favorables à ce que la minorité de blocage du transfert puisse être exercée, l’intérêt que nous y voyons étant pour les élus de leur permettre d’arriver à construire progressivement un consensus rationnellement étayé avant l’échéance de 2026.
- Pour coller le plus possible à la réalité de terrain et prendre en compte les différences de problématiques entre eau, assainissement, ruissellement et pluvial, nous pensons aussi utile que la sécabilité des compétences soit effective. En pratique, la récupération des eaux de ruissellement et de pluie est plus affaire communale qu’intercommunale. Le mode de gestion budgétaire différent en atteste d’ailleurs.
- Nous souhaitons aussi que les démarches déjà engagées sur les territoires ne soient pas remises en question par les décisions que nous allons prendre en légiférant.
- Je veux aussi rappeler ici que la loi actuelle, sur un périmètre de syndicat donné, permet la coexistence de modes différents de gestion (régies, DSP …) et que la convergence tarifaire, si elle est évoquée par la loi, n’y oblige pas expressément. L’uniformisation du mode de gestion et l’égalité tarifaire peuvent ainsi être évalués, en tant que scénario et stratégie planifiés dans le temps si les élus le souhaitent pour et avec les usagers.
Un autre point mérite attention parce qu’il touche à l’engagement citoyen :
- Comment préserver, dans le cadre adapté que nous allons définir, la participation actuelle de conseillers municipaux ou de délégués des communes, actifs et dévoués, au sein de syndicats ou de régies existants amenés à disparaitre, alors que ces personnes ne sont pas conseillers communautaires ? Le service de l’intérêt général par ces citoyens actifs s’en trouverait affaibli. Il faut l’éviter et cela mérite que nous en discutions.
« Pour terminer, nous voulons saluer l’intention initiale qui a présidé aux travaux du groupe piloté par Mme la ministre Jacqueline GOURAULT. La suite nous a pour le moins surpris, avec une proposition de loi du groupe majoritaire de l’assemblée nationale plutôt qu’un projet de loi gouvernemental et un débat législatif qui commence à l’Assemblée nationale pour un texte relevant de l’organisation des collectivités locales. Ni l’esprit, ni la lettre de la loi ne sont respectés. »
« Il n’en reste pas moins que le chantier de la simplification est immense ! Les élus locaux attendent à juste titre, eux qui sont au bout de l’entonnoir avec les difficultés que l’on sait, que nous poursuivions ce type de démarche sur d’autres sujets, je pense à l’urbanisme notamment.
Dernier mot en forme de vœux: « Adaptons pragmatiquement la loi en ayant en tête de donner plus de liberté aux élus locaux, dans l’intérêt premier des populations et des territoires ».
Téléchargez ici le texte de l’intervention de Franck Montaugé