Le Sénat a adopté mercredi 22 septembre 2021 en première lecture une proposition de loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dans une version sensiblement modifiée par rapport au texte voté fin juin par l’Assemblée nationale. Ce texte prévoit :
- de généraliser le fait de recourir à un contrat écrit lorsqu’un producteur agricole (éleveur laitier, de bovins etc.) vend un produit à un acheteur. Le premier acheteur doit alors prendre en compte différents indicateurs de référence dont celui du coût de production pour déterminer le prix inscrit au contrat ;
- que le contrat contiendra désormais une clause de révision automatique des prix permettant le cas échéant à l’agriculteur de répercuter auprès de l’aval les hausses de coûts qu’il subit ;
- de réglementer différemment les négociations commerciales entre l’industriel et la grande distribution. Pour ce faire, il est prévu que l’industriel affiche dans ses conditions générales de vente la part que les matières premières agricoles représentent dans le volume du produit alimentaire et dans son tarif. Différentes options s’ouvrent à lui pour afficher cette part. Il est prévu également que cette part ne soit pas négociable lors de la tractation commerciale afin de « sanctuariser » la matière première agricole.
Dans son intervention à la tribune lors de la discussion générale, le sénateur Montaugé a regretté que cette proposition de loi dite « EGALIM 2 », malgré certaines avancées, ne puisse garantir à tous les agriculteurs une juste rémunération de leur travail et une prise en compte de leurs charges de main d’œuvre et de capital.
Il estime que seule une remise à plat complète du système de formation des prix permettrait d’apporter des réponses adaptées et efficaces. Dans cet objectif, Franck Montaugé a notamment obtenu par voie d’amendement :
- que le Gouvernement remette un rapport au sénat sur les possibilités de revenir dans le domaine des productions agricoles sur les principes de la Loi de Modernisation de l’Economie (LME) de 2008 qui a consacré le rapport de force dans les négociations tout au long de la chaine de valeur alimentaire, au détriment des producteurs et de leur rémunération. (Consulter l’amendement)
- que le Gouvernement remette un rapport au sénat sur les difficultés de la mise en œuvre des principes de la loi EGALIM 2 pour la coopération agricole dont les spécificités de rémunération des producteurs–coopérateurs nécessitent d’être prises en compte. (Consulter l’amendement)
Le sénateur Montaugé et son groupe regrettent que d’autres amendements n’aient pas été retenus. Parmi ces propositions, l’établissement du coût de production réel et son instauration comme prix plancher dans le cadre des relations commerciales auraient permis de répondre à l’écueil principal du texte. (Consulter l’amendement).
Censée gommer l’échec de la loi EGALIM de 2018, la proposition de loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs pourrait conduire à une nouvelle déception pour le monde agricole. Pour autant, le texte comporte quelques avancées telles que :
- La généralisation des contrats écrits et pluriannuels,
- L’introduction d’une transparence du coût d’achat des matières premières,
- L’expérimentation d’un « rémunérascore » destiné à assurer une information claire au consommateur sur le niveau de rémunération des producteurs français. (Consulter l’amendement)
- La redéfinition des missions du médiateur des relations commerciales, (Consulter l’amendement)
- La création d’un comité de règlement des différends commerciaux agricoles.
Mais pour permettre aux agriculteurs français de vivre correctement de leur métier, une politique des petits pas ne suffit pas. Livrés aux rapports de force des négociations commerciales, les agriculteurs sont les grands perdants d’une situation qui n’a que trop duré. L’enjeu est désormais – sans aller vers un système de prix totalement administrés – de leur permettre de se rémunérer dignement et de couvrir significativement leurs charges de production.
Bien qu’il ne règle pas la question du revenu du producteur, le sénateur Montaugé et son groupe ont voté ce texte « EGALIM 2 » tout en exprimant de fortes réserves sur son efficacité réelle. Députés et sénateurs vont maintenant tenter de se mettre d’accord sur une version commune de ce texte présenté par le ministre Julien Denormandie comme une “loi de régulation”. Une commission mixte paritaire (CMP) à laquelle participera Franck Montaugé tentera de trouver un accord entre les deux chambres.
Le sénateur Montaugé estime que « Même si la CMP devait être conclusive – ce que je souhaite – il faudra s’engager dans une loi de modernisation de l’économie agricole française répondant aux enjeux de rémunération des agriculteurs, de souveraineté alimentaire, de compétitivité au plan national et international, de transition climatique et de développement des territoires ruraux et j’insiste sur l’urgence de cette démarche. ».
Consulter l’ensemble des amendements déposés par le sénateur Montaugé