La ville d’Auch a rendu un émouvant hommage à la mémoire du lieutenant Jean Bureau, un Auscitain tombé au champ d’honneur en 1914 et dont le nom vient d’être rajouté à la liste des morts pour la France du monument de la place Salinis. Dans un discours prononcé lors de la cérémonie de commémoration de l’armistice du 11 novembre 1918, le sénateur-maire Franck Montaugé a rappelé l’histoire singulière de cet homme, mort en Belgique le 27 novembre 1914 à l’âge de 32 ans, et dont le nom oublié ne figurait pas sur le monument aux morts.
« Il aura fallu attendre 2011 pour que cette omission soit enfin réparée dans des circonstances plutôt singulières. C’est en effet par hasard qu’un membre de l’Union nationale des combattants de l’Eure découvre lors d’un déménagement un carnet un peu jauni dépassant d’une poubelle. Il le récupère et comprend qu’il s’agit du journal personnel d’un poilu de la Grande Guerre, originaire d’Auch. L’ancien combattant de Haute-Normandie contacte alors le directeur de l’ONACVG du Gers, Patrick Gauchet, qui retracera après des recherches le parcours et la vie de ce soldat. »
« Ému par cette histoire, soucieux de préserver la mémoire des anciens combattants, le directeur de l’ONACVG du Gers, sollicitera la mairie d’Auch pour que le nom de Jean Bureau soit inscrit au monument aux morts de la Ville. Ce que nous faisons aujourd’hui solennellement ce 11 novembre 2015 ; 101 ans après le décès du Lieutenant Bureau. »
« Derrière le visage et la mémoire du Lieutenant Bureau, nous avons souhaité rendre une nouvelle fois hommage à tous ces jeunes gens morts dans la fleur de l’âge pour défendre leur Patrie et la Liberté. Au moment où décède Jean Bureau, le bilan des pertes depuis le 4 août 1914 est de plus de 300 000 hommes tués et 600 000 blessés du côté français. Alors que la France a perdu 5,30 % de sa population entre les recensements de 1911 et 1921, le Gers a perdu 12,5 % de sa population dans le même temps (l’Ariège 13 %, mais la Gironde 1,2 % et la Haute-Garonne 1,8 %). »
« Ainsi notre département ne compte plus que 194 406 habitants en 1921 et il est évident que les populations paysannes ont été sacrifiées. La ville d’Auch, avec 371 morts n’est pas épargnée, pas plus que ne l’a été le 88ème régiment d’infanterie totalement décimé à Roclincourt en Picardie le 9 mai 1915 au cours d’une offensive aussi meurtrière qu’inutile. Tout cela, des monuments le rappellent et le commémorent dans les pays belligérants et sur les champs de bataille, où il ne reste plus que des cimetières. Tout cela, dans chaque pays, les livres d’histoire le disent, après les mémoires et les récits écrits par les survivants en Allemagne, en Grande-Bretagne ou en France. »
« Mais le fil de la mémoire est ténu et il peut se briser à tout moment, ajoute Franck Montaugé. Après la disparition des derniers poilus de la Grande Guerre, nous ne disposons plus désormais, pour tenter de comprendre et de saisir l’événement, que du travail des historiens et de témoignages littéraires. Il y a aussi le travail méticuleux, opiniâtre et trop souvent ignoré de tous ces « sauveteurs de mémoire », particuliers ou associations, qui luttent à leur façon contre l’oubli, cette gangrène de l’Histoire. Ce travail ne se réduit pas à une vaine logique qui consisterait à accumuler des objets mais bien de les interroger. »
« A cet égard et pour l’énorme tribut que les gersois de 14-18, soldats et familles, ont douloureusement payé à la Nation et à la Paix, un lieu de mémoire à caractère muséal aurait je le crois, pleinement sa place dans notre département ! », suggère Franck Montaugé qui conclut son propos par cette adresse au lieutenant retrouvé: « En ce jour du 11 novembre 2015, trouvez Jean Bureau, dans l’apposition de votre nom sur le mémorial de votre ville natale, l’expression de la reconnaissance et du respect de la communauté nationale pour votre sacrifice. »