Le sénateur Franck Montaugé est intervenu jeudi matin à la tribune du Sénat dans le cadre de la discussion du volet « agriculture » du projet de loi de finances 2018. Voici le texte de son intervention :
« À quelques points près que j’aborderai, deux mots caractérisent le budget agricole général et celui de la mission AAFAR (Agriculture, Alimentation, Forêt et Aménagement Rural) qui nous sont présentés: continuité et attente. Continuité parce que les orientations majeures de la loi d’avenir agricole, je pense à l’objectif de transition agro-écologique et à la conciliation des enjeux de performance économique, sociale et environnementale, sont confirmés. Attente parce qu’aucune mesure répondant fondamentalement aux besoins des agriculteurs, qu’il s’agisse de niveau de revenu, de gestion prévisionnelle des risques de de marché, de juste retour de la valeur ajoutée aux producteurs et même de compétitivité de la ferme France, n’apparait dans ce budget. En tout cas de manière distinctive par rapport au précédent budget. »
« C’est un constat plus qu’un jugement de valeur et je souhaite que les orientations retenues à l’issue des Etats généraux de l’alimentation permettent de répondre aux attentes aussi urgentes que légitimes de nos agriculteurs. Cette démarche a suscité beaucoup d’attentes de tous les acteurs, et il ne faudra pas les décevoir ! Faut-il comprendre, parce que rien, absolument rien n’y fait référence dans les programmes et les actions de ce budget, que c’est le budget 2019 qui prendra en compte les mesures retenues issues des États généraux ? »
« Comment les soutiens spécifiques nécessaires, pour la partie de leur financement concernant l’État, doivent-ils être identifiés, sur des lignes budgétaires qui sont semblables à celles du budget précédent ? Pour notre compréhension du chemin que vous voulez faire prendre à notre agriculture, à la filière agroalimentaire et à la distribution, il sera intéressant de vous entendre sur ces points M. le Ministre ! »
« L’autre grand sujet qui surplombe ce budget, c’est celui de la prochaine Politique agricole commune. Il y a quelques jours, nous avons eu connaissance des orientations que la commission européenne voudrait donner à la prochaine PAC. Indépendamment de la question du niveau du budget de la prochaine PAC qui sera un sujet majeur, la révision qui se profile, si elle devait aboutir, n’est ni une adaptation, ni une évolution. Elle peut être comprise comme une révolution, une révolution basée sur la reprise en main par les États membres de leur politique agricole. Mais une reprise en main très encadrée par le biais
- d’objectifs fixés aux États par la commission
- de plans stratégiques définis par les États, présentés à la commission qui les valident ou les fait amender
- d’une évaluation périodique par la commission des résultats atteints par les États.
« La simplification et la prise en compte de la diversité des agricultures nationales ont été au fondement de ce projet de nouvelle PAC. Le principe de subsidiarité pourrait donc à l’avenir être au cœur de son fonctionnement. Et nous ne serions alors pas loin d’une renationalisation de la PAC. Je n’ouvre pas ici le débat de fond sur les avantages et les inconvénients de la formule mais j’espère que nous y reviendrons rapidement. Le groupe de suivi de la PAC de notre haute assemblée apportera son expertise à cette nouvelle situation. Si le budget 2018 ne peut traduire les premières conséquences de ce qui pourrait être une évolution managériale de la PAC, l’anticipation de ce nouveau modèle et de ses conséquences prévisibles est cruciale pour la performance de l’État français. Partagez-vous cette approche et comment le cas échéant cette anticipation se traduit dans le budget 2018 dont nous discutons aujourd’hui? »
« Vous parlez à propos de ce budget M. le Ministre et je vous cite de « première étape d’une transformation sans précédent de l’agriculture française ». Je n’ai pas su trouver de nouveauté et je vois plutôt un budget de reconduction, la hausse de 400 millions d’euros étant en grande partie la conséquence de la création d’une provision pour aléas de 300 millions d’euros et de l’intégration pour 45 millions d’euros du budget pêche qui était avant dans la mission Ecologie.»
« Je regrette, au moment où la question du revenu est si problématique pour beaucoup trop d’agriculteurs, la suppression de la réduction de 7 points de la cotisation personnelle maladie. Les MAEC (mesures agro environnementales) sont en baisse de près de 4 millions d’euros et plus incompréhensible encore est la baisse de 13 millions d’euros des fonds destinés à la modernisation des exploitations. Enfin, le Président de la République avait annoncé vouloir mettre en place une épargne de précaution individuelle pour les agriculteurs. Rien n’est prévu en ce sens dans le budget 2018. C’est regrettable quand on sait la nécessité de se doter d’outils divers de gestion des risques agricoles. »
« En définitive, ce que pourrait être la politique agricole et agroalimentaire du gouvernement est renvoyé à la loi ou aux ordonnances issues des EGA (Etats Généraux de l’Alimentation) d’une part et à la prise en compte des nouvelles orientations de la PAC d’autre part. L’essentiel étant à venir, nous nous abstiendrons. »