Depuis plusieurs années maintenant, le gouvernement a développé une politique de la ville qui permet de prendre en compte de manière efficace les problèmes générés par l’urbanisation rapide et souvent mal maîtrisée des années soixante et soixante-dix. Concentration de l’habitat social et augmentation de la pauvreté ont créé des îlots dans lesquels la vie sociale s’est appauvrie, la vie économique a reculé et l’insécurité a augmenté. La communauté d’agglomération du Grand Auch que je préside bénéficie aujourd’hui des mesures énergiques mises en oeuvre auprès de deux cents quartiers identifiés comme « prioritaires ». On ne peut que se féliciter d’une politique qui stimule le partenariat et associe les populations à la redéfinition de l’espace public et à la dynamisation du territoire sur lequel elles vivent.
Il y a dans ce modèle de politique concrète, pragmatique et participative, des enseignements à tirer et une méthode à développer au service des problématiques d’aménagement du territoire. Si la question des banlieues a fait l’objet d’une prise en compte aussi volontariste, c’est en grande partie à cause des crises aigües qu’elle a suscitées aux marges de nos grandes métropoles. Aujourd’hui, d’autres crises se profilent à bas bruit. Je veux parler de celles qui touchent une partie de nos territoires les plus ruraux, cette partie où la densité de population devient si faible qu’il a fallu créer un nouveau terme pour la désigner: l’hyper-ruralité.
De grandes zones du territoire national peuvent aujourd’hui se réclamer de cette « hyper-ruralité » qui progresse au rythme où nos grandes métropoles se développent. Cette réalité est heureusement prise en compte par la loi NOTRe. De nouveaux outils sont à la disposition des élus locaux qui ont la possibilité de se regrouper. J’observe le début d’une vraie prise de conscience de la part des élus de terrain qui, même quand la loi ne les y contraint pas, s’engagent dans la création de communes nouvelles ou dans la fusion de leurs communautés de communes.
Ce mouvement est positif, mais il faut aller plus loin. Sur le modèle de ce qui a été entrepris pour résoudre les problématiques des villes, il faut agir au niveau législatif pour réinventer l’avenir des campagnes. Je voudrais qu’en 2016, nous construisions une loi de programmation et d’orientation de la ruralité qui prenne en compte toutes les problématiques dont souffrent nos départements hyper-ruraux. Nos campagnes regorgent de bourgs et de villages de grande qualité pour lesquels les élus se mobilisent depuis de longues années en investissant, et qui sont capables d’accueillir des populations nouvelles qui créeront de l’activité et permettront de maintenir de bons niveaux de service. Comment faire pour que des pans entiers du territoire décrochent ou ne décrochent pas de la dynamique nationale? Comme dans les banlieues, la question de l’égalité, pivot central de notre devise républicaine nationale, est mise à l’épreuve.
L’exemple de la politique de la ville nous dit comment nous emparer de cette question aux multiples facettes. Les réponses, nécessairement multiples elles aussi, doivent être trouvées sur le terrain, avec le concours des maires et des élus ruraux, mais aussi avec la participation des citoyens. La mise en oeuvre des premières mesures de la loi NOTRe, et je pense en particulier à la naissance des nouvelles grandes régions, nous invite fortement à passer à l’action. La force de la loi doit nous aider à donner la première impulsion. Des actions bien conçues, procédant d’une volonté nationale, peuvent permettre de capter des moyens à certains endroits qui participeront à la revitalisation de nos espaces hyper-ruraux.
Il faut accorder à nos zones rurales la même attention que celle que nous portons à nos villes, y consacrer des moyens, envisager des mécanismes qui permettent à ces territoires de rester contributeurs au développement économique et à la création de richesse nationale. C’est la proposition que j’ai faite au Président de la République lors d’une récente rencontre au palais de l’Elysée. La décision de François Hollande qui a permis d’intégrer à la politique de la ville des quartiers de zones rurales comme le Grand Garros à Auch est un premier signal positif. Il faut maintenant aller plus loin.
Franck Montaugé