Mercredi 2 octobre, le Sénat débattait de la question de “L’intelligence artificielle: enjeux politiques, stratégiques et économiques”. C’est dans le cadre de ce débat que le sénateur du Gers, Franck Montaugé, par ailleurs président de la commission d’enquête sur la souveraineté numérique, a posé une question au secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Economie et des finances et du ministre de l’Action et des comptes publics, chargé du numérique, Cédric O.
“L’exploitation algorithmique des grandes bases de données – les big data – est un des aspects que recouvre la notion d’intelligence artificielle (IA), qui est sémantiquement plus large en réalité, et ma question portera sur les conséquences de ces techniques sur le travail et l’emploi. Nous le constatons aujourd’hui avec les travailleurs du clic et de la nouvelle industrie des plates-formes, le monde du travail est peu préparé à l’économie du numérique qui émerge sous nos yeux et partout dans le monde. Il est très difficile d’évaluer les conséquences du développement de l’IA, de l’automation et de la robotique notamment sur le plan du solde des emplois qui en résultera. Ce qui parait certain par contre c’est que la plupart des métiers et des organisations seront affectés.”
“Dans son rapport intitulé Donner un sens à l’IA, le député Cédric Villani en appelle à une réflexion sur les modes de complémentarité entre l’humain et l’IA, une complémentarité non aliénante mais source de progrès pour l’humanité et prenant en compte la dimension écologique de l’économie nouvelle émergente précise-t-il ! Dans ce contexte, quelles initiatives et démarches structurées le Gouvernement va-t-il prendre pour refondre le pacte social et républicain d’ores et déjà affecté par ces nouvelles formes de travail ? Dans un ouvrage récent (1) la sociologue Dominique Meda dit, je la cite, que le capitalisme de plate-formes participe de l’émergence de formes renouvelées voire exacerbées de sujétion du travailleur.”
“La proposition intéressante de Cédric Villani de créer un lab public de la transformation du travail retient-elle votre intérêt pour articuler ces grandes transformations sociétales avec les politiques publiques qui doivent les prendre en compte et même les anticiper ? Dans cette réflexion sur la relation IA-emploi, quelle place, quel rôle actif le Gouvernement entend-il faire jouer aux territoires autres que métropolitains ou péri-métropolitains ?”
“La recherche n’est pas unanime pour savoir si l’intelligence artificielle détruira ou créera de l’emploi, a répondu le secrétaire d’Etat, Cédric O. Les Allemands ont six fois plus de robots que nous et ils ont le plein-emploi. Il faudra donc s’y préparer, former et reformer les gens. C’est au cœur du pacte sur lequel nous travaillons avec Bruno Le Maire et Muriel Pénicaud. Il y aura 20 000 emplois dans le numérique. Il ne faut pas se limiter aux métropoles. Les choses se feront autour de bassins d’emploi. C’est autour de Perpignan et de Lille que les acteurs doivent se voir pour s’adapter au changement”, dit-il.
“Merci d’avoir évoqué les questions territoriales”, a répliqué le sénateur Franck Montaugé pour qui l’émergence de la stratégie nationale en IA reste trop lente. “Les moyens financiers alloués apparaissent limités au regard de ceux qu’y consacrent les Etats-Unis et la Chine. Dans la continuité de la déclaration de la Commission européenne intitulée L’IA pour l’Europe, il est urgent que soit créé un Projet important d’intérêt européen commun (PIIEC) pour l’IA sur le modèle du Plan Nano 2022″, conclut-il.
1 — « Les nouveaux travailleurs des applis » Sarah Abdelnour et Dominique Méda (PUF)