Le Sénat a adopté mercredi 15 février, le texte visé par la commission mixte paritaire de la proposition de loi relative à la lutte contre l’accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle. « À mon tour de me réjouir de l’aboutissement de ce texte sur deux sujets à forts enjeux », a déclaré le sénateur du Gers en préambule de son intervention à la tribune.
« L’accord trouvé sur la mise en œuvre expérimentale des Certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques est à souligner parce qu’il traduit un progrès et plus significativement une maturité certaine dans l’approche de la question sanitaire en agriculture, dit-il. La pression sociétale pour une alimentation saine et de qualité justifie pleinement ces dispositions et je salue le travail du ministre qui a engagé, avec la loi d’Avenir, notre agriculture dans la triple performance économique, sociale et environnementale. »
« Le sens de l’accord trouvé c’est aussi celui de la confiance dans notre capacité collective à trouver et mettre en œuvre des solutions palliatives efficaces. La dynamique de création de dispositifs alternatifs est bien enclenchée, par les acteurs de terrain eux-mêmes et il faut s’en réjouir », poursuit le sénateur du Gers qui note aussi qu’au plan européen « les choses bougent dans le bon sens ». La veille en effet, le Parlement européen avait appelé par un vote à un mécanisme simplifié d’autorisation de mise sur le marché, plus rapide et plus facile, des pesticides biologiques à faible risque et des produits de biocontrôle. « Cette filière doit se développer comme une alternative efficace aux produits phytopharmaceutiques », ajoute Franck Montaugé.
Compte tenu des enjeux de santé et des risques encourus, y compris pour les agriculteurs eux-mêmes, le sénateur a émis le souhait qu’une nouvelle législation voie rapidement le jour afin d’accélérer les procédures d’évaluation, d’autorisation et d’enregistrement des pesticides à faibles risques. « Pour ce qui est de notre texte, dit-il encore, et en attendant la généralisation espérée du biocontrôle, je persiste à penser que l’agriculteur ne doit pas supporter seul la responsabilité de l’emploi des produits phytopharmaceutiques. Et c’est d’ailleurs une question majeure aujourd’hui pour l’agriculture française. Comme pour la valeur ajoutée agricole ou agroalimentaire, la responsabilité de réduction de l’usage des produits phytopharmaceutiques doit être répartie de l’amont à l’aval, des fournisseurs d’intrants aux metteurs en marchés. Le texte va dans ce sens. Il faudra veiller à ce que dans la pratique son esprit ne soit pas détourné au détriment de l’agriculteur! »
La maîtrise du foncier agricole, enjeu de souveraineté nationale
Deuxième volet du texte adopté mercredi, la protection juridique des terres agricoles est désormais renforcée. Pour autant, « ce point de progrès notable doit nous engager maintenant vers une nouvelle étape, sous la forme d’une loi foncière spécifique qui traiterait du foncier agricole en lien avec l’ensemble du foncier national », estime Franck Montaugé pour qui, la maîtrise du foncier agricole de notre pays relève d’un enjeu de souveraineté nationale.
« Entre autres questions, la capacité financière des SAFER à intervenir efficacement et la rémunération des externalités positives des espaces ruraux et agricoles pourraient être utilement abordés en lien avec les espaces métropolitains et urbains. Ce sujet des externalités positives et de leur prise en compte au bénéfice des agriculteurs pourrait faire l’objet de propositions d’amélioration dans le cadre de la future PAC. Pour ce qui est du pouvoir d’intervention des SAFER, les moyens nécessaires doivent être disponibles pour que la mission que nous leur confions et que nous avons renforcée avec ce texte puisse être correctement exercée. Je propose qu’à partir de là, le Parlement appréhende la problématique des moyens nécessaires aux SAFER en prenant en compte la réalité des missions, du fonctionnement et des résultats constatés de tous les opérateurs publics du territoire, je pense en particulier aux Établissements Publics Fonciers qui prélèvent par la fiscalité directe de la ressource sur les territoires ruraux-agricoles qui, en retour, n’en bénéficient pas ou très peu. »
« Au cœur de cette loi foncière que nous pourrions être amenés à débattre prochainement devrait donc figurer l’objectif d’égalité territoriale, de justice territoriale ».
« Pour terminer, poursuit Franck Montaugé, je voudrais dire combien les deux sujets de ce texte nous rappellent que l’agriculture se situe dans un moment de mutation profonde et accélérée qui appelle de nous tous un bon diagnostic, une problématisation juste et un plan d’action tout aussi pertinent qu’efficient. L’agriculture est en crise et les éleveurs gersois sont hélas bien placés pour mesurer ce qu’il en est depuis deux ans dans la filière du gras. Mais la crise c’est aussi au sens étymologique du mot, le choix, la prise de décision. À cet égard, l’année 2017 sera essentielle pour l’avenir du modèle de Politique Agricole Commune et je souhaite que la France fasse valoir l’intérêt de ses paysans et de ses territoires dans le concert agricole européen. »
« Le Sénat, dit-il, sera force proposition et je me réjouis qu’après les débats nombreux que nous avons eus ici sur le sujet, l’initiative d’un groupe de suivi de la PAC ait été prise. Sous la présidence de Jean Bizet j’aurai l’honneur d’en être un des rapporteurs. Deux mots là-dessus : Notre agriculture est confrontée, au plan national comme européen, à des enjeux:
- de sécurité et de qualité alimentaire
- économiques
- environnementaux
- territoriaux
- et de résilience à l’égard des nombreux aléas dont elle est en permanence l’objet.
Pour répondre à ces enjeux, nous devons faire une analyse juste du fonctionnement de la PAC actuelle et en déduire les objectifs pertinents pour la prochaine, en cours de préparation. La PAC post 2020 doit être construite sur les objectifs suivants :
- Croissance, emploi et compétitivité
- Contribution aux enjeux climatiques et environnementaux
- Développement de la ruralité
- Gestion des risques de toute nature pour une agriculture plus résiliente et plus durable
- Respect et prise en compte de la diversité des modèles et soutiens proportionnés.
« Sans rentrer dans les détails, l’enjeu de gestion et de couverture des risques économiques, la question du niveau et de la garantie du revenu du producteur agricole conditionneront l’avenir de notre agriculture et le devenir de nombre de nos territoires. La proposition de loi « Développement d’outils de gestion des risques en agriculture » (lire ici) que nous avions présentée avec Henri Cabanel et Didier Guillaume et que nous avions votée ici à l’unanimité pourra être utilement reprise dans cette perspective. »
Téléchargez ici le texte de l’intervention de Franck Montaugé