La délégation du Sénat aux collectivités territoriales a adopté le jeudi 8 juillet 2021 le rapport d’information de Franck Montaugé et de son collègue Hervé Maurey intitulé « Défense extérieure contre l’incendie (DECI) : assurer la protection des personnes sans nuire aux territoires ». Par défense extérieure contre l’incendie, ou DECI, il faut comprendre tout équipement permettant de constituer une source d’eau suffisante pour aider les sapeurs-pompiers lors de leurs interventions. Ce système de défense peut se constituer de bornes d’incendie, de certaines réserves naturelles d’eau ou encore de citernes.
Alors que ces équipements relevaient auparavant d’une logique nationale, la loi du 17 mai 2011 est venue territorialiser leur implantation, permettant à chaque département d’élaborer son propre règlement. Traduisant une volonté de prendre en compte les spécificités locales, cette gestion révèle aujourd’hui des faiblesses.
La non-couverture, selon les normes en vigueur, de 6 à 7 millions de Français contre le risque incendie témoigne de cette politique parfois inadaptée aux réalités locales. En l’absence d’études préalables et d’impact, les petites communes rurales ont le plus grand mal à assumer les dépenses de mise à niveau (extension du réseau d’eau, installation de points d’eau supplémentaires…) exigés par les règlements départementaux de DECI (RDDECI). Leur développement et leur attractivité s’en trouvent de ce fait entravés notamment par l’impossibilité de construire ou même parfois de simplement agrandir une habitation.
Les rapporteurs se prononcent donc pour une remise à plat de la DECI au travers de 20 recommandations (Consulter les propositions du rapport). Une évaluation exhaustive, département par département, doit être réalisée par l’État pour mesurer les résultats obtenus depuis 2011. Les RDDECI doivent être revus en réalisant une étude d’impact dans chaque département, pour tenir compte des conséquences financières pour les communes et examiner les solutions alternatives (augmentation et évolution des moyens du SDIS). L’assouplissement des règles de DECI est à rechercher, chaque fois que cela est possible, au regard des résultats de cette évaluation et des études préalables. Les règlements doivent être strictement proportionnés à la réalité du risque de chaque territoire. Une méthodologie précise et exigeante de concertation des acteurs de la DECI est indispensable. L’accompagnement technique et budgétaire des communes doit être renforcé : les sénateurs Montaugé et Maurey estiment ainsi d’ores et déjà nécessaire l’affectation d’une enveloppe de 1,2 milliard d’euros sur 3 ans à la DECI dans le cadre du plan « France Relance ».
« La défense extérieure contre l’incendie se trouve à un tournant. Une prise de conscience et des décisions importantes sont attendues. Comment se satisfaire d’une situation où plusieurs millions de nos compatriotes sont mal protégés ? Comment imaginer que les communes, déjà soumises à de fortes tensions budgétaires, puissent engager des projets de mise aux normes obérant pour plusieurs années toute autre capacité d’investissement ? Comment accepter que des mesures réglementaires inadaptées, ou disproportionnées face au risque, remettent en question les efforts des collectivités pour développer leur territoire et les rendre plus attractifs ? Les maires, en particulier ceux des petites communes et des zones rurales, doivent être entendus. Dans leur préoccupation face à une situation qui en réalité s’enlise. Dans leur inquiétude à l’idée de voir leur responsabilité, y compris judiciaire, engagée. Dans leur aspiration à mieux travailler avec les services de l’État et les acteurs majeurs que sont les services préfectoraux et les SDIS. » déclare Franck Montaugé.
« Les maîtres mots des décisions à prendre dès à présent sont bien identifiés : concertation, évaluation, étude d’impact, arbitrage, optimisation des moyens, suivi de la dépense, soutien budgétaire, innovation. Moins que d’une nouvelle réforme, la défense extérieure contre l’incendie a désormais besoin d’une modernisation au service de tous ses acteurs. Si celle‑ci n’est pas engagée dans les meilleurs délais, une initiative parlementaire sera prise sous la forme d’une proposition de loi tirant les enseignements de cette mission d’information et de l’indispensable évaluation au plan national que nous demandons à l’État. » conclut-il.